testes sinovac

Comme souvent dans ce genre de situation, les choses débutent par un événement anodin qui prend ensuite des proportions inattendues… Le 9 novembre, suite au décès d’un participant, l’ANVISA, l’agence sanitaire gouvernementale, ordonne l’arrêt des tests liés au vaccin anti-Covid-19 chinois Sinovac, menés au Brésil par l’Institut Butantan. Trois jours plus tard, cette interruption est levée, preuve ayant été apportée que la mort de la personne concernée n’avait rien à voir avec l’administration du vaccin. Mais Jair Bolsonaro s’empare de l’affaire et proclame qu’il n’autorisera jamais au Brésil la distribution du « vaccin de João Doria ».

instit-butanta-006L’Institut Butantan dépend en effet de l’État de São Paulo dont le gouverneur, João Doria, allié de Bolsonaro en 2018, est devenu son principal rival dans la perspective des élections de 2022. Le ministre de la Santé, le général Eduardo Pazuello, ne l’entend pas de cette oreille. Immédiatement, il rétorque que si le vaccin Sinovac prouve son efficacité, ses services le feront distribuer dans tout le pays. Le vice-président du Brésil, le général Hamilton Mourão endosse publiquement cette position. Première fissure publique au plus haut niveau de l’État.

L’Amazonie, enjeu d’une passe d’armes

hamilton mourao 1Acte deux : dès l’élection de Joe Biden confirmée par les médias nord-américains, le même Hamilton Mourão reconnaît publiquement sa victoire. Contredit tout de suite par Jair Bolsonaro. À l’occasion d’un forum sur l’Amazonie, le président profère des menaces directes contre la politique du futur chef de la Maison-Blanche, lequel dit envisager des sanctions économiques si le Brésil ne change pas de politique environnementale. « Quand la diplomatie ne suffit plus, on peut faire parler la poudre ! » déclare Jair Bolsonaro.

edson pujolHamilton Mourão tente ensuite de rattraper l’impair de son président : « ce qu’il a dit, ce n’est qu’une figure de rhétorique », mais au sein de l’armée, on ne voit pas les choses comme ça. Devant le malaise des troupes d’active, leur commandant en chef, le général Edson Pujol s’exprime publiquement : « nous ne prenons pas part au débat politique et nous voulons encore moins que la politique entre dans les casernes. Le rôle de l’armée, c’est de défendre les institutions et la légalité. »

bolsonaro com militares« Je ne dis rien d’autre, » rétorque alors Bolsonaro, mais le mal est fait. Les divergences avec son vice-président sont désormais actées et les militaires se positionnent clairement du côté d’Hamilton Mourão. Bolsonaro est en passe de perdre l’appui de l’armée dont on connaît l’esprit de corps et, à terme, éventuellement, le contrôle de son gouvernement. La moitié de ses ministres, en effet, sont des officiers retraités et 2 897 militaires occupent des charges au sein de l’administration gouvernementale.

Bolsonaro — Biden, un contentieux ancien entre les deux

biden dilmaPour en revenir aux rapports entre Jair Bolsonaro et le futur président américain Joe Biden, leur contentieux est ancien. En 2014 — Biden était alors le vice-président d’Obama et Dilma Rousseff encore présidente du Brésil — le mandataire américain apporte à Brasilia un document déclassifié explosif émanant des forces militaires US. Il confirme les tortures et les assassinats qui ont eu lieu durant la dictature au Brésil. « Je suis heureux d’annoncer que les États-Unis ont débuté un programme spécial afin de partager avec la Comission nationale pour la Vérité mise en place par le Brésil des documents déclassifiés de notre administration militaire. » Le lieu et le moment de cette déclaration ne sont pas anodins. Dilma Rousseff, la présidente brésilienne était aux côtés de Joe Biden à Brasilia. Dilma Rousseff avait été elle-même torturée durant la dictature.

bolsonaro balelaCinq ans plus tard, fraîchement élu président du Brésil, Jair Bolsonaro rejette ces révélations et accuse la Comission nationale pour la Vérité de véhiculer des mensonges : « dans les archives de 1964, il n’y a pas de documents disant qu’on a assassiné ou que l’on n’a pas assassiné. Tout ça, c’est des conneries ! »  À ce jour, Jair Bolsonaro, à la différence de son vice-président, n’a toujours pas reconnu la victoire de Joe Biden aux États-Unis.